Entre la mort du Caporal Peugeot à 19 ans (photo ci-contre), le 2 août 1914, premier mort français de la première guerre mondiale et celle de Lazare Ponticelli, 109 ans, le dernier survivant, le 12 mars 2008, il s'est écoulé 34 191 jours (Trente quatre mille cent quatre-vingt-onze jours !)
Ce matin, devant ma télé (j'étais pas dans mon lit douillet, mais c'est tout comme) je regarde la commémoration de l'Armistice à Douaumont. À 20 ans, bidasse, j'y ai fait une prise d'armes dans le froid et un vent qui comme aujourd'hui faisait flotter les pavillons avec la discrète élégance qui sied aux reportages télévisés, et je vous jure qu'il est impossible, immobile et fiché au garde-à-vous pour la durée indéterminée que jugeront bonne les officiels présents, entouré de ces milliers de tombes, toutes plus égales les unes que les autres, ou errant dans l'ossuaire, cherchant on ne sait quoi, de ne pas avoir envie de hurler avec Prévert "Quelle connerie la guerre".
Car 50 ans après l'événement, et au-delà des tombes soignées avec beaucoup plus de vigilante attention et d'affectueux bons soins que ne le furent jamais leurs occupants, la terre de Verdun respirait encore la mort et le chaos. À l'époque, tout cela me semblait loin... 40 ans après, c'est à dire aujourd'hui, le temps s'est rétréci, 90 ans est un âge que je peux envisager d'avoir assez vite, donc, à rebours, c'est hier ; et Verdun reste Verdun, comme en témoigne le petit document ci-joint.
Que ce matin, Sarkozy ait quasiment réhabilité les déserteurs et les fusillés, victimes d'erreurs de commandement ou à qui on avait demandé plus que ce qu'ils pouvaient supporter paraitra peut-être futile ou sans intérêt aux jeunes générations... C'est au contraire un signe fort que la Der des ders entre enfin dans l'Histoire, après que le soldat Ponticelli a fermé la porte en sortant. Qu'on se souvienne que Les sentiers de la Gloire de S. Kubrick, tourné en 1957, ne fut autorisé en France qu'en 1975...
Ne manque plus, pour boucler la boucle, qu'on fasse un bon vieux procès en incompétence et en stupidité au génialissime Nivelle et consorts, pour qu'il soit définitivement établi que les cimetières militaires sont aussi la conséquence de la bêtise obstinée de quelques haut-gradés, et non pas, comme aimait à le répéter inlassablement le Capitaine qui commandait la Compagnie dans laquelle j'étais trouffion, "une erreur de crapahut" (ce mot étant sans doute tombé dans l'oubli grâce à la suppression du Service national, je précise que c'était la dénomination offcielle des marches militaires, en manœuvre ou au combat, il y a quelques années ; existe aussi sous la forme crapahuter : marcher dans des conditions difficiles.)
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